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Les formes plus inhabituelles de kératocône

Les formes plus inhabituelles de kératocône

Le Kératocône

Les formes plus inhabituelles de kératocône

Le kératocône aigu

Le kératocône aigu est une complication du kératocône très évolué probablement déclenchée par des microtraumatismes (frottement oculaire).

Il s’agit d’une rupture brutale de la couche postérieure de la cornée (la couche de Descemet), entraînant la constitution immédiate d’un oedème localisé majeur de la cornée.

Cette complication entraîne des douleurs intenses, un larmoiement, une gêne à la lumière majeure et une grande difficulté à ouvrir les yeux (blépharospasme).

Dans l’ensemble des statistiques, la fréquence des kératocônes aigus est de 2,6 %. Cet évènement est plus fréquent chez les sujetq porteurs d’une trisomie 21 ou chez les patients allergiques.

La cicatrisation de la couche de Descemet prend quelques semaines et aboutit à la formation d’une cicatrice souvent paracentral applatissant le sommet du kératocône.

Parfois la vision la vision du patient peut s’en trouver améliorée par rapport à l’état antérieur au kératocône aigu !

Il est souhaitable de mettre en route un traitement pour faire baisser la pression intraoculaire, et réduire l’inflammation et la douleur.

Des études récentes suggèrent que l’injection d’une bulle de gaz non expansif ou d’air dans la chambre antérieure de l’oeil permet d’accélérer la cicatrisation et de réduire partiellement les douleurs.

Le kératocône aigu n’est pas une indication de greffe de cornée en urgence.

Le kératocône dans la trisomie 21 (mongolisme)

Le kératocône est beaucoup fréquent chez les sujet porteur d’une trisomie 21 (environ 0.5 à 15% des cas soit 10 à 300 fois la prévalence de la population générale).

L’évolution est caractérisée par la fréquence accrue des complications, notamment la survenue d’un kératocône aigu, probablement favorisée par les traumatismes cornéens, fréquents chez ces patients.

La greffe de cornée perforante n’est pas d’un bon pronostic sur ce terrain et il est préférable de recourir si nécessaire à la greffe lamellaire ou aux anneaux intracornéens.

La dégénérescence marginale pellucide (ou kératocône marginal)

La dégénerescence marginale pellucide est vraisemblablement une forme périphérique de kératocône.

On observe en effet des cas dans lesquels d’un des yeux est porteur d’une dégénérescence marginale pellucide et l’autre d’un kératocône typique.

La dégénerescence marginale pellucide se caractérise par une ectasie décentrée et un pseudo aplatissement central de la cornée.

Il s’agit d’une affection bilatérale qui se traduit par un amincissement de la cornée périphérique dans le secteur inférieur, habituellement entre 4h et 8h. Ceci entraîne un aplatissement de l’axe vertical de la cornée avec un astigmatisme important et souvent irrégulier. L’amincissement intéresse une bande étroite de 1 à 2 mm de large, elle-même séparée du limbe par une zone de cornée normale de 1 à 2 mm de large. La cornée centrale est d’épaisseur normale et fait saillie au-dessus de la zone d’amincissement.

Cette zone d’amincissement cornéen est claire, toujours épithélialisée, avasculaire, sans dépôt lipidique, ce qui la distingue d’affections tel que l’ulcère de MOOREN ou la dégénérescence marginale de TERRIEN.

Elle peut se compliquer de poussées aiguës, aboutissant à une cicatrice cornéenne parfois vascularisée.

Cette affection est habituellement rencontrée entre la deuxième et la cinquième décade de la vie. Elle est rare dans les régions occidentales.

Le kératoglobe (forme extrême de kératocône)

Cette affection est une ectasie cornéenne majeure, rare, bilatérale, caractérisée par la protrusion globuleuse de la cornée.

L’amincissement est souvent extrême et diffus. L’amincissement cornéen peut atteindre 20 % de l’épaisseur cornéenne normale. Il est moindre près du limbe. On ne note pas d’anneau métallique ni de cicatrice cornéenne.

Bien qu’elle s’accompagne de myopie forte et d’astigmatisme de haut degré, l’acuité visuelle peut parfois être relativement conservée.

L’évolution du kérato-globe est avant tout marquée par les risques de perforations cornéennes et de ruptures spontanée.

L’ectasie post-Lasik

La survenue d’un kératocône après chirurgie de la myopie au Lasik est un évènement assez rare (1 cas sur 2000 environ).

Il n’est pas encore clairement déterminé si l’ectasie révèle un kératocône préexistant au Lasik et non détecté par les examens préopératoires ou si l’ectasie peut être réellement déclenché par un Lasik pratiqué sur une cornée antérieurement normale. (Holland, Srivannaboon et al. 2000)

Pour être en mesure de retenir la réalité d’une ectasie véritablement induite par le Lasik, il faudrait, en effet, réunir les arguments suivants :

  • Absence de kératocône ou de dégénérescence marginale pellucide préopératoire latent selon les critères définis ci-dessus.
  • Réalisation du Lasik avec respect effectif d’un mur postérieur de 250 µm et absence de traumatisme ou de photoablation secondaire du volet
  • Constatation d’une déformation progressive et irréversible de type ectasique (association d’une augmentation de l’élévation postérieure puis antérieure associée à un amincissement focal) sur la topographie d’élévation, par rapport à une sphère de référence centrée constante.

A ce jour, nous n’avons pas eu connaissance d’un seul cas publié (Seiler and Quurke 1998; Speicher and Gottinger 1998; Amoils, Deist et al. 2000; Joo and Kim 2000; McLeod, Kisla et al. 2000; Muravchik 2000; Ozdamar, Aras et al. 2000; Schmitt-Bernard, Lesage et al. 2000; Dantas 2001; Horn 2001; Mack 2001; Stratas 2001; Vinciguerra and Camesasca 2001), répondant à ces critères précis.

Selon les études épidémiologiques, la fréquence du kératocône serait de 0.05 à 0.75 % dans la population générale et de 5 à 11% dans la population des candidats à la chirurgie réfractive. Compte tenue de la sensibilité du dépistage (environ 98% actuellement), on aurait du observer au minimum entre 20000 et 44000 nouveaux cas de kératocône parmi les 20 millions de cas de Lasik opérés depuis 1992 dans le monde, ou encore 300 à 660 nouveaux cas en France (sur la base de 300000 cas). Cette « épidémie » s’ajouterait à celle des kératocônes induits depuis 30 à 40 ans par des kératochirurgies plus agressives telles que le kératomileusis avec ou sans congélation et la kératotomie radiaire, ainsi que par la PKR. Les 20 références publiées ne rapportent en tout que quelques dizaines de cas, en relation avec des ablations supérieure à 150µ, ou ne permettant pas d’affirmer la réalité de l’ectasie ou l’absence de kératocône préopératoire (Seiler and Quurke 1998; Speicher and Gottinger 1998; Amoils, Deist et al. 2000; Joo and Kim 2000; McLeod, Kisla et al. 2000; Muravchik 2000; Ozdamar, Aras et al. 2000; Schmitt-Bernard, Lesage et al. 2000; Dantas 2001; Horn 2001; Mack 2001; Stratas 2001; Vinciguerra and Camesasca 2001).

Il est cependant admis que les lamelles stromales subissent une redistribution mécanique dynamique induite par le Lasik. Ce remaniement s’accompagne d’un déplacement antérieur de la surface postérieure de 40 µ en moyenne (Baek, Lee et al. 2001), favorisé par une faible clinique préopératoire, par une pression intraoculaire élevée et par une ablation importante. Il ne semble pas s’accompagner de réduction progressive du volume cornéen total ou d’ectasie (Chayet, Assil et al. 1998).

La prévention du risque d’ectasie repose actuellement sur le postulat de Barraquer, repris par Seiler, d’un lit stromal résiduel de 250 µm. Ce postulat a été étayé par une étude montrant que le déplacement antérieure de la surface postérieure était significativement plus important (40 µ contre 17 µ) en cas de lit résiduel inférieur à 250 µ (Wang, Chen et al. 1999). Une étude portant sur la puissance cornéenne postérieure retrouve du résultat comparables (Seitz, Torres et al. 2001). Au moins deux observations ont cependant documenté la survenue d’un kératocône après Lasik laissant un stroma postérieur résiduel de 310 et 298 µm respectivement, mais dans les deux cas l’absence de kératocône préopératoire n’a pu être affirmée (Lipshitz and Dotan 2000), (Geggel and Talley 1999).

En définitive, Il semble prudent de respecter les critères de détection du kératocône infraclinique fondés sur la topographie cornéenne d’élévation.

Il ne faut pour autant pas négliger les critères classiques, et notamment interroger le sujet sur d’éventuels antécédents personnels d’évolution de l’astigmatisme (l’astigmatisme congénital est stable) ou de changement d’œil directeur. La notion de microtraumatismes oculaires significatifs (frottement oculaire, appui oculo-digital pendant le sommeil) est également un facteur de risque à éliminer. Il convient enfin de rechercher des antécédents familiaux de kératocône ou de kératoplastie. En cas de doute, il est recommandé de temporiser la chirurgie de 6 à 12 mois afin de contrôler la stabilité cornéenne.

La récurrence du kératocône après greffe de cornée ancienne

La greffe de cornée perforante permet une correction souvent satisfaisante de la déformation de la cornée.

Cependant, un astigmatisme irrégulier peut de nouveau apparaître au cours de l’évolution et progresser parfois de façon importante, ce qui a fait évoquer la notion d’une « récurrence », d’une « récidive » ou d’une « transmission » du kératocône sur le greffon cornéen.

Ce problème survient en général tardivement, 10 à 35 ans après la greffe de cornée.

Il doit être distingué de

  • l’astigmatisme survenant après l’ablation des fils de suture de la greffe 1 à 2 ans après l’intervention
  • l’astigmatisme lié à une ectasie importante résiduelle de la berge réceptrice en cas de greffon centré (pour réduire le risque de rejet) sur un kératocône très excentré

La récurrence du kératocône sur greffe correspond le plus probablement à une déformation évolutive de la périphérie cornéenne (berge réceptrice) dont l’effet mécanique induit une modification progressive de la forme du greffon et un astigmatisme irrégulier progressif.